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On s’aimera
Léo Ferré (1916-1993) – On s’aimera, 1966
On s’aimera On s’aimera ce printemps
Pour un quignon de soleil Quand les soucis guignols
Qui s’étire pareil Dansent le french cancan
Au feu d’un feu de bois Au son du rossignol
On s’aimera Quand le chignon d’hiver
Pour des feuilles mourant De la terre endormie
Sous l’oeil indifférent Se défait pour refaire
De monseigneur le froid L’amour avec la vieOn s’aimera cet automne On s’aimera
Quand ça fume que du blond Pour un tapis tout vert
Quand sonne à la Sorbonne Où comme les filles de l’air
L’heure de la leçon Les abeilles vont jouer
Quand les oiseaux frileux On s’aimera
Se prennent par la taille Pour ces bourgeons d’amour
Et qu’il fait encore bleu Qui allongent aux beaux jours
Dans le ciel en bataille Les bras de la forêtOn s’aimera cet hiver On s’aimera cet été
Quand la terre est peignée Quand la mer est partie
Quand s’est tu le concert Quand le sable est tout prêt
Des oiseaux envolés Pour qu’on s’y crucifie
Quand le ciel est si bas Quand l’oeil jaune du ciel
Qu’on le croit au rez-de-chaussée Nous regarde et que c’est bon
Et que le temps des lilas Et qu’il coule du miel
N’est pas prêt d’être chanté De ses larmes de plombOn s’aimera On s’aimera
Pour un manteau pelé Pour une vague bleue
Par les ciseaux gelés Qui fait tout ce qu’on veut
Du tailleur des frimas Qui marche sur le dos
On s’aimera On s’aimera
Pour la boule de gui Pour les sel et le pré
Que l’an neuf à minuit De la plage râpée
A roulée sous nos pas Où dorment des corbeauxOù dorment des corbeaux
Léo Ferré et sa seconde épouse Madeleine (photo J.P. Sudre)
Quelques années plus tard, en 1968, les corbeaux de la plage s’étaient réveillés…« On s’aimera » a sans doute été dédiée à Madeleine Rabereau, la deuxième épouse et muse du chanteur avec laquelle il a vécu entre 1950 et 1968. Voici ce que déclare la fille de celle-ci Annie Butor, à propose de Léo Ferré : « Il n’avait rien du poète éthéré. Il était susceptible, procédurier, râleur, âpre au gain (mais aussi très généreux). Et il avait la dent dure : « Tous des cons ! » sauf Catherine Sauvage, Caussimon, Aragon, Elsa Triolet, Breton… (…) D’autres, Gréco, Montand, Roland Petit, Ionesco, Buñuel… sont encore plus mal lotis. Quant à Brel, Léo ricanait sur son « je t’offrirai des perles de pluie venues de pays où il ne pleut pas ». Cela ne veut rien dire ! éructait-il. La fameuse photo réunissant Brel, Brassens et Ferré, en 1969, relève plus du symbole d’une époque que de réelles amitiés. »
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