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Leçons
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C’est sur nous maintenant
comme une montagne en surplomb
Dans son ombre glacée,
on est réduit à vénérer et à vomir.
À peine ose-t-on voir.
Quelque chose s’enfonce pour détruire.
Quelle pitié
quand l’autre monde enfonce dans un corps
son coin !
N’attendez pas
que je marie la lumière à ce fer.
Le front contre le mur de la montagne
dans le jour froid
nous sommes pleins d’horreur et de pitié
Dans le jour hérissé d’oiseaux.
Philippe Jaccotet – Leçons, poème 10 – Poésie/Gallimard 1977
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Misère
comme une montagne sur nous écroulée.
Pour avoir fait pareille déchirure,
ce ne peut être un rêve simplement qui se dissipe.
L’homme, s’il n’était qu’un nœud d’air,
faudrait-il, pour le dénouer, fer si tranchant ?
Bourrés de larmes, tous, le front contre ce mur,
plutôt que son inconsistance,
n’est-ce pas la réalité de notre vie
qu’on nous apprend ?
Instruits au fouet
Philippe Jaccotet – Leçons, poème 12 – Poésie/Gallimard 1977
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Un simple souffle, un nœud léger de l’air,
une graine échappée aux herbes folles du temps,
rien qu’une voix qui volerait chantant
à travers l’ombre et la lumière.
s’effacent-ils : aucune trace de blessure.
La voix tue, on dirait plutôt, un instant,
l’étendue apaisée, le jour plus pur.
Qui sommes-nous, qu’il faille ce fer dans le sang ?
Philippe Jaccotet – Leçons, poème 13 – Poésie/Gallimard 1977
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