article publié une première fois le 6 décembre 2015
Coeur sur glace
Navires sibériens sur les icebergs de nuit Vous avez des oiseaux à bord Les oiseaux noirs d’une fiancée inconnue Celle qui a un cœur sous le sein transparent de neige
Mais dans ma maison de ciment armé Ma barbe pousse comme aux morts Mes yeux creusés pour mieux la recueillir La femme sous mon crâne L’oiseau de proie qui mange ma cervelle .
Yvan Goll – (Images de Paris – n° 40, Avril 1923. 9 vers )
Yvan Goll (1891-1950) est un écrivain et poète français qui a participé aux mouvements expressionniste et surréaliste. Né à Saint-Dié, commune des Vosges restée française après le rattachement de l’Alsace-Lorraine à l’Empire allemand en 1870, il poursuivra ses études commencées en France aux universités de Strasbourg, Fribourg-en-Brisgau et Munich. Cette formation allemande jointe à sa connaissance de l’anglais fera que son œuvre poétique sera trilingue. Exilé aux États-Unis entre 1939 et 1947 pour échapper, en tant que juif, aux persécutions allemandes, il ne survivra que peu de temps à son retour France, victime d’une leucémie.
« Solidaire des hommes et des bêtes, Solidaires des eaux, de la boue, de la roche et des champs, des forêts et forêts de constellations… » Lorand Gaspar
« comprendre vraiment ce qu’est être ici nuage, martinet, homme ou caillou — c’est ainsi dans les moments les plus simples que le dire s’enracine en son vivre — puisse la saveur du jour dans la gorge portée par l’ouverture trouvée, pour d’autres parmi les herbes renaître – »
(Patmos)
Quelle joie de découvrir un poète qui vous était jusqu’alors inconnu, un poète qui vous parait immense, virtuose dans la maniement des idées, des métaphores, des images, des mots et des sons… C’est comme un continent nouveau qui se serait soudainement révélé à vous, continent dont il va falloir longer les cotes, remonter les fleuves, pénétrer les forêts et gravir les montagnes. Et vous vous sentez honteux d’avoir ignoré si longtemps cette Atlantide.
Originaire de la lointaine Transylvanie orientale, il est né à Târgu Mureș le 28 février 1925 en Roumanie. La ville a longtemps fait partie de la Hongrie mais intégrée en 1920 par le traité du Trianon à la Roumanie. C’est ainsi que Lorand Gaspar de langue maternelle hongroise, langue qui était à l’époque encore majoritaire (57%) naîtra citoyen roumain. Dans sa ville, on parle également le roumain, bien sûr (27%) mais aussi l’allemand (2%). Il expliquera plus tard que durant son enfance, il parlait couramment ces trois langues avec en plus le français que son père lui avait fait apprendre. Une importante communauté juive était également installée dans la ville (12% de la population). C’est sans doute à cause de cette expérience du cosmopolitisme qu’il sera saisi très tôt par le démon du voyage et la quête d’horizons nouveaux. Après des études à l’Ecole polytechnique de Budapest, il est déporté en 1944 en Allemagne dans un camp de travail du Bad Wurtemberg dont il s’évade en 1945, rejoint les troupes françaises et se retrouve dans un camp en Alsace où on lui laisse le choix de rentrer en Transylvanie ou rester en France. C’est ce dernier choix qu’il opère, accomplissant ainsi l’un de ses vœux d’enfance, et aider par la communauté hongroise de France, il parviendra à mener à bien des études de médecine. Ayant acquis au cours de ses études la nationalité française et attiré par l’écriture depuis son enfance, il se pose le choix de sa langue d’écriture. il choisira le français plutôt que le hongrois expliquant plus tard qu’il ne pouvait « pas concevoir de vivre dans une langue, (…), et d’exprimer son expérience vécue dans une autre. » Après l’obtention de son diplôme de chirurgien, son premier emploi le conduira au Moyen Orient où il exercera dans les hôpitaux français de Jérusalem et de Bethléem puis de 1970 à 1995, à l’hôpital Charles-Nicolle de Tunis. De ses expériences de l’Orient et du désert, naîtront trois recueils de poèmes : Le Quatrième Etat de la matière (1966), Gisements (1968) et Sol absolu (1972).
Et demain, pourtant, nous repartirons à la conquête du lieu sans nom, du nom imprononcé. D’où tenons-nous que seule cette possibilité, perçue brûlante dans chacune de nos molécules, peut nous rendre habitable l’épaisseur ?
Le poème n’est pas une réponse à une interrogation de l’homme ou du monde. Il ne fait que creuser, aggraver le questionnement. Le moment le plus exigeant de la poésie est peut-être celui où le mouvement (il faudrait dire la trame énergétique) de la question est tel – par sa radicalité, sa nudité, sa qualité d’irréparable – qu’aucune réponse n’est attendue ; plutôt, toutes révèlent leur silence. La brèche ouverte par ce geste efface les formulations. Les valeurs séparées, dûment cataloguées, qui créent le va-et-vient entre rives opposées sont, pour un instant de lucidité, prises dans l’élan du fleuve. De cette parole qui renvoie à ce qui la brûle, la bouche perdue à jamais.
Qui n’a pas ressenti que tout ce qui nous éclaire, nous ouvre à plus de vie, à une meilleure compréhension de nous-même et de l’autre, de nos désirs, de nos rapports, se traduit en fin de compte par un sentiment d’accroissement et d’élargissement ? Et je pense qu’il nous est arrivé à tous de sentir, de constater même, que la rencontre avec une œuvre d’art, l’articulation active qui se noue, immédiatement ou plus progressivement, entre elle et nous, peut nous faire accéder à plus de force et de confiance à des moments obscurs ou opaques, nous montrer une ouverture pour l’esprit, pour tous les mouvements de la vie qui tournaient en rond, ou étaient paralysés par l’adversité, par notre aveuglement.
De puits en puits de bouche en bouche nous maintenons la foi d’un jardin profond gisement de sèves odeurs enfouies bourgeonnement sous les reins de la terre d’un puits à l’autre cependant l’absence s’aiguisait. L’eau fébrile de la halte lui donnait son éclat d’ange exterminateur.
Quelqu’un avance dans la poudre d’icônes dans la farine jaunie des baisers du monde et ses jambes sont ivres d’un vin lucide que sa fatigue a tiré des ronces et des craies.
Un couteau a brillé au jardin de nageoires – âme sans écailles jetée sur les pierres son odeur d’herbes fraîchement coupées – mais encore et encore le ressac broie
le duvet des ailes dans les cailloux nous parle à bout de souffle du malheur et la voix à jamais étonnée perfuse l’épaisseur de sa trame décousue.
Toutes ces mers et tous ces déserts que tu as traversés pour te perdre près de ce puits où l’odeur secrète de la plante avait attiré le serpent. À présent la fraîcheur de ce mur qui se fend, une aile qui bouge dans la pierre. Au soir dans la chaux la vieille transhumance que tu n’as pas nommée. Et tu sais qu’il y a des oiseaux qui montent sans cesse
dans le vin de l’espace d’un été. C’est déjà octobre. La voix frêle du rouge-gorge dérape sur une eau que le vent fait trembler –
» (…) une telle conclusion ne se fonde pas sur le droit international et reflète simplement le parti pris politique d’Amnesty envers Israël. En outre, Amnesty renforce ses allégations sur la base de présumés comptes-rendus anonymes de soldats de bas rang de Tsahal – comptes-rendus qui peuvent difficilement être utilisés pour tirer des conclusions sur la politique de l’armée israélienne. Contrairement aux affirmations d’Amnesty, l’armée israélienne – en tant qu’armée d’un Etat démocratique attaché à la primauté du droit – mène toutes ses activités, conformément au droit international. »
Le 20 juillet dernier, révolté par la brutalité de l’intervention israélienne à Gaza et la complaisance du gouvernement français et du Président Hollande en particulier vis à vis de la politique d’Israël, j’avais produit un article sur ce thème et ressorti deux poèmes écrits au début de l’année 2009 à l’occasion d’une précédente intervention israélienne (c’est ICI). Dans l’article, je citais le nombre de morts alors recensés :
intervention israélienne à Gaza de juillet 2014 – bilan au 20 juillet 2014 : Israël : 7 morts dont 2 civils, Palestine : 400 morts dont 80 % de civils, 2.400 blessés
Dix jours plus tard, au moment où je rédige ce nouvel article le bilan s’est considérablement alourdi :
Israël : 59 morts dont 3 civils, Palestine : 1.348 morts, près de 7.000 blessés, trois quarts de civils et 245 enfants. Six écoles de l’Agence des Nations unies pour les réfugiés ont été atteintes par les bombardements israéliens qui ont fait de nombreuses victimes. L’unique centrale électrique du territoire a été touchée privant d’électricité la population d’une grande partie du territoire.
J’intitulais l’article précédent « obscénité »...
Obscène en effet le « tir au pigeon » d’une armée ultra-moderne suréquipée sur une population civile vulnérable.
Obscène en effet la logorrée froide et cynique des dirigeants israéliens qui justifient sans aucun état d’âme dans les médias leur politique insensée.
Obscène en effet la mauvaise fois de ce gradé israélien droit dans ses bottes qui justifie le bombardement d’une école de l’Agence des Nations unies pour les réfugiés (le deuxième en quelque jours) par un tir ennemi tiré à proximité et qui déclare sans rire que jamais l’armée israélienne ne tirera volontairement sur une école. A croire que les 1.348 morts de la présente intervention, en majorité des civils, l’ont été par hasard…
Obscène en effet la passivité des états occidentaux qui se satisfont de la situation inique et insupportable imposée au peuple palestinien à qui l’on demande de supporter sans faire de vagues sa situation et qui n’interviennent que mollement, à contre-cœur, quand Israël dépasse les bornes : « Vous pouvez agir, mais avec mesure, tout de même, n’exagérez pas trop »… Le comble de cynisme est atteint avec la déclaration du Président Obama qui exigeait l’arrêt du conflit pour « des raisons stratégiques »… Traduction : Je ne vous demande pas d’arrêter votre intervention pour des raisons humanitaires mais parce que celle-ci est contre-productive sur le plan stratégique par l’hostilité qu’elle provoque vis à vis d’Israël et ses alliés.
Obscène quand certains sionistes manipulateurs tentent de diaboliser toute opposition à la politique de l’état d’Israël en la faisant passer pour de l’antisémitisme.
J’avoue qu’il est difficile de s’intéresser à la peinture, à la poésie et de vivre sereinement au moment même où chaque jour on apprend que des civils innocents dont de nombreux enfants sont déchiquetés par les bombes… Et que faire pour réagir et pour pouvoir peser sur les évènements ? Ironiquement, c’est finalement le Président Obama qui nous donne la solution : il ne nous reste plus qu’à peser sur le plan stratégique en faisant évoluer les consciences par l’information et l’alerte dans le but de faire agir les peuples afin qu’ils fassent pression sur leurs gouvernements et sur les dirigeants israéliens.
C’est dans ce but que j’ai décidé d’ajouter à cette action collective à mener et à développer ma modeste contribution en créant un nouveau thème de réflexion sur ce blog qui s’intitulera « Palestine« . Je précise que ma position n’est pas anti-israélienne par principe. Je suis pour le droit à l’existence de l’état d’Israël dans des frontières sûres et reconnues mais cette existence ne doit pas être menée au détriment d’un autre peuple et dans le mépris des droits humains.
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Pour deux pays avec deux peuples en attendant un pays avec deux nations.