Vivez parmi les arbres… Hironaka Ogawa & Associates, 2010
Hironaka Ogawa
La décision de l’architecte Hironaka Ogawa d’intégrer des arbres à l’intérieur de l’espace de la maison est née d’une discussion avec son client au cours de laquelle celui-ci lui avait raconté qu’il avait l’habitude, enfant, de grimper dans les arbres pour y rester un long moment et qu’il éprouvait pour cette époque une profonde nostalgie.
Découverte sur le site ARCHITECTURE DE COLLECTION qui présente des exemples d’architecture remarquable des 20e et 21e siècle (c’est ICI ), voici la villa MASSON à Issy-les-Moulineaux dans le département des Hauts-de-Seine, située à à peine 15 minutes en voiture du centre de Paris. Elle a été conçue en 1999 par les architectes Jacques Heurard de Fontgalland et Bernard-Jacques André qui se sont largement inspirés de l’architecture du célèbre architecte américain Richard Meier dont nous avions présenté dans ce blog la maison emblématique bâtie en 1973 à Harbour Springs sur une pente boisée dominant le lac Michigan, la Douglas House (voir ci-dessous).
–––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––– Douglas House à Harbour Springs (Michigan), architecte Richard Meier ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
La maison a été bâtie sur les pentes d’une colline boisée dominant le lac Michigan. Certains critiques l’ont présentée comme « flottant » sur la cime des arbres. Pour notre part, elle nous semble plutôt« jaillir » du sous-bois comme si elle voulait s’en extraire pour accrocher la lumière et la vue. la maison est une structure parallélépipédique verticale en béton qui se développe sur 5 niveaux . Les premiers niveaux sont constitués d’une lourde enveloppe close en béton armé qui a pour mission d’ »ancrer » la maison dans la pente. Les niveaux supérieurs se développent dans une structure de béton, de métal et de verre qui contraste violemment avec son assise en béton armé et apparaît comme une structure cristalline et légère qui chercherait à s’extraire de la gangue lourde et massive incrustée dans le sol. Les pièces de vie sont aménagées dans les niveaux supérieurs et bénéficient, grâce aux immenses baies vitrées, d’un éclairement maximum et de la vue sur le lac Michigan.
Effectivement lorsque l’on compare les deux façades principales, on retrouve dans la villa Masson, plusieurs éléments constitutifs de l’architecture propre à Richard Meier, en particulier les grandes baies vitrées se développant sur plusieurs niveaux qui font entrer la lumière à profusion dans la maison, les terrasses qui se développent sur les différents niveaux et rythment les façades et le choix délibéré de la couleur blanche pour les murs extérieurs et les menuiseries selon le concept des « Whites ».
Au rez-de-chaussée, l’espace se séjour se développe, comme souvent dans les maisons de Meier, sur 2 niveaux et est abondamment éclairé par les grandes baies vitrées. Il offre un point d e vue sur l’escalier qui, placé un peu en retrait, permet d’accéder au sous-sol et aux trois étages qui surmontent le rez-de-chaussée.
Caractéristiques
dénomination : maison MASSON
lieu d’implantation : sur une île de la Seine, l’île Saint-Germain à Issy-les Moulineaux (92), France.
caractéristiques du terrain : Le terrain de 514 m2 est situé en bordure de Seine et possède un ponton privatif. Il est bien orienté
maître d’œuvre : Jacques Heurard de Fontgalland et Bernard-Jacques André, architectes, qui s’étaient installés sur l’île Saint-Germain et qui étaient plutôt des architectes spécialisés dans l’architecture de l’espace de travail et de l’aménagement d’entreprise (structure « A.R.T réalisations »).
date des travaux : 1998-1999
surface de plancher : 420 m2 de surface totale
programme : R + 3 comprenant séjour, salle à manger, salon, cuisine, 5 chambres, 3 salles de bains, home-cinéma, terrasses et sous-sol de 150 m2 avec garage 3 places, atelier et cave climatisée.
structure : murs latéraux porteurs + structure porteuse centrale composée de murs porteurs ou de poteaux métalliques – poutres métalliques.
la maison « Eel Nest » à Echo Park Los Angeles, CA, USA
Données
Maître d’œuvre : Anonymous Architectes – Simon Storey
charge de projet : Ben Warwas
localisation : Echo Park, Los Angeles, CA, USA
Surface de plancher : 960 pieds carrés (environ 89 m²)
Surface du terrain: 780 pieds carrés (environ 72 m²)
Chambres : 2 – Salle de bain : 1
Fin des travaux : mars 2011
Entrepreneur : Armex construction, Los Angeles
photographies : Steve King et Elisabeth Daniels
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la maison « Eel Nest » dans son quartier
Présentation
Cette maison aurait pu être édifiée au Japon : on retrouve en effet dans ce projet les caractéristiques habituelles des maisons contemporaines japonaises : simplicité formelle, pragmatisme dans les solutions techniques adoptées pour résoudre les problème posés par le site et le programme. Le nom de la maison « Eel Nest », (nid d’anguilles) est d’ailleurs le nom donné au japon aux parcelles résiduelles d’à peine cinq mètres de largeur que l’on trouve en ville et dont l’étroitesse rend la construction difficile. C’est ainsi que la maison conçue l’agence d’architecture Anonymous Architectes a une largeur de seulement 4,5 m. Le quartier de Echo Park est un quartier résidentiel situé au nord de la ville bâti sur un site vallonné. L’architecture y est disparate avec une majorité de constructions avec toitures en pente dont beaucoup font référence au style hispanique. Le terrain était primitivement occupé par une petite bâtisse construite en 1929 qui a été démolie à l’exception des murs du sous-sol qui ont été intégrés à la nouvelle structure. Pour répondre au programme de surface fixé sur un terrain aussi étroit les architectes ont développé la maison sur trois étages et pour économiser l’espace ont supprimé les couloirs à l’intérieur du bâtiment.
L’entrée s’effectue au rez-de-chaussée par le volume semi-enterré conservé de l’ancienne maison dans lequel ont été aménagés un petit vestibule et un garage. Du vestibule un escalier permet l’accès au niveau 1 qui abrite l’espace séjour et la cuisine ouverte qui s’ouvrent par de grandes baies vitrées sur l’espace de la rue et sur le jardin. L’escalier a été traité en claire-voie pour ne pas réduire visuellement l’espace du séjour. Le niveau supérieur est celui des chambres (au nombre de deux) et de l’unique salle de bains. L’escalier continue sa course vers la toiture terrasse aménagée en solarium. Les grandes baies vitrées des façades et la limitation des surfaces de cloisonnement permettent à la lumière d’entrer à profusion et offrent des vues variées sur la ville. Parce que la maison est construite en limites de propriété, le code de l’urbanisme exigeait que ses façades soient classées coupe-feu. Pour résoudre ce problème, les architectes ont revêtu la maison d’un enduit ciment pour améliorer la résistance au feu.
L’entrée de la maison et l’escalier d’accès au premier étage
niveau 1 : l’espace séjour et la cuisine ouverte
niveau 1 : l’espace séjour avec sa grande baie vitrée et l’escalier à claire-voie
niveau 2 : la chambre côté jardin et la salle de bains
niveau 3 : la toiture terrasse aménagée et son escalier d’accès. De la terrasse, on domine Los Angeles et la vue porte jusqu’au montagnes de San Gabriel et jusqu’au signe mythique d’Hollywood.
Non ! M. Le Corbusier, la maison ne pouvait se réduire à n’être qu’une simple « machine à habiter », elle doit aussi être une porte ouverte sur le rêve….
Optical Glass House à Hiroshima, architectes : Hiroshi Nakamura & NAP
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Hiroshi Nakamura : né à Tokyo, 1974. Etudes d’architecture au Département d’architecture, diplômé de l’Université de Meiji en 1999. Hiroshi Nakamura a travaillé de 1999 à 2002 en tant qu’ingénieur en chef pour le célèbre architecte japonais Kengo Kuma& Associates En 2012 sa réalisation « Optical Glass House »a obtenu un prix pour l’architecture émergente. Prix et récompenses : Grand Prix, JCD Design Award 2006 / Grand Prix, GOOD DESIGN AWARD 2008 / attribution Shinkenchiku 2010 / Conception Vanguard 2010. Hiroshi Nakamura est classé au ARCHITECTURAL RECORD TOP parmi les 10 architectes qui comptent dans le monde (Etats-Unis).
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Information sur le projet
Nom du projet: « Optical Glass House » fonction : maison d’habitation conception : Hiroshi Nakamura & co sieste, ltd. conception de structures : Moribe yasushi structure : structure en béton armé façades : verrez et briques de verre toiture : traitée en terrasse entrepreneur : société Imai emplacement: naka-ku, Hiroshima-shi, Hiroshima, Japon surface du terrain : 243.73 m2 superficie totale de plancher: 363.51 m2 année d’achèvement : mars 2012 crédit photographique : Koji Fujii, Nacasa & Partners.
L’un des contes les plus fameux de la littérature chinoise classique, Le Voyage vers l’Ouest raconte les aventures de Sun Wukong (Son Gokû en japonais) surnommé le Roi des Singes, un singe de nature espiègle né d’un rocher et doué de pouvoirs magiques. Le premier de ses exploits le montre, alors qu’il vient à peine de naître, faire franchir à une troupe de singes une cascade derrière laquelle se trouve une grotte, Huaguoshan Dongtian, la Caverne Céleste du Mont des Fleurs et des Fruits dont il fera son royaume et dans laquelle il vivra un moment avec sa tribu. L’un des plus grands illustrateurs japonais, Tsukioka Yoshitoshi a réalisé une série d’estampes mettant en scène les aventures du célèbre singe et l’une d’entre elles le montre en train de traverser la cascade.
La traversée de la cascade qui cache l’entrée d’une caverne enfermant un trésor fabuleux ou permettant à des héros de se soustraire à la traque de poursuivants est un classique de de l’imaginaire populaire et de la littérature enfantine et nous avons tous rêvé, enfants, qu’après avoir franchi la cascade, comme le font Tintin, le capitaine Haddock et le petit indien Zorrino dans le Temple du soleil, nous retrouver dans un autre monde, un monde fabuleux, comme si nous avions traversé le miroir…
Voici à titre d’exemple l’extrait d’un dialogue tiré d’un scénario de science-fiction dans lequel deux personnages accèdent à une caverne merveilleuse en franchissant une cascade :
Jack et Tosh entreprirent de faire le tour du lac. Le projet se révéla ambitieux car la végétation était encore plus dense. Il leur fallait par moment entrer dans l’eau le long de la berge pour pouvoir passer. Jack ne lâchait pas la main de Tosh. Elle eut rapidement l’air épuisé. Il la trouvait courageuse, car elle ne se plaignait jamais. Finalement, ils arrivèrent à la hauteur de la cascade. – Tu sais Jack, j’espère qu’il y a quelque chose derrière, car je ne me sens pas capable de retourner de suite où nous étions! – Viens! Approchons-nous! lui dit-il d’un grand sourire charmeur destiné à lui redonner du courage. Il se faufila le premier derrière les trombes d’eau, tout en se tenant aux rochers afin de ne pas se faire entraîner par quelques violentes giclées. Une fois de l’autre côté, il tendit la main à Tosh qui la saisit avec force. Jack la tira vers lui et la récupéra de l’autre côté. Tous deux se retournèrent dans un même élan et constatèrent avec stupéfaction la beauté du lieu dans lequel ils se trouvaient. Une immense caverne se dévoilait devant leurs yeux. Un grand lac se trouvait aussi de ce côté de la cascade. Ils s’approchèrent de l’eau et constatèrent que de la vapeur s’en échappait. Jack approcha sa main de la surface avec précaution afin d’évaluer le degré de température de l’eau. La vapeur étant loin d’être brûlante, il finit par plonger la main. – Whaou! La température idéale! Bonjour la baignoire! s’exclama Jack. Tosh, surprise fit de même. – Un lac chauffé par la roche magmatique profonde! déduisit Tosh. Alors qu’ils se redressaient, ils réalisèrent que la seule ouverture visible était celle par laquelle ils s’étaient faufilés et qui était en partie masquée par le rideau d’eau. Pourtant, l’intérieur de la caverne était suffisamment clair. En fait, elle était baignée par une lumière douce et verte. Ce lieu était vraiment aussi beau qu’à l’extérieur! Quelle planète paradisiaque! – Regarde les parois Jack! On dirait qu’elles sont recouvertes d’une substance fluorescente! – Il semblerait que ce soit des algues microscopiques! On dirait qu’avec le temps, elles ont colonisé presque toutes les parois de la caverne, répondit Jack en jetant un regard circulaire.
Ces images rêvées que la plupart d’entre nous n’ont fait qu’imaginer, elles existent dans la nature et quelques privilégiés ont pu les contempler.
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Les archétypes mêlés de la cascade et de la grotte Dans ce cas particulier nous nous trouvons en présence d’un double archétype, celui des eaux courantes et violentes et celui de la caverne. Les eaux violentes que Bachelard a analysé de manière remarquable dans L’eau et les rêves expriment à la fois les thèmes héraclitéens du mouvement qui anime toutes choses, de la fuite de la vie et du temps et la colère que manifeste parfois les éléments naturels et il est vrai qu’une cascade inquiète; le mouvement furieux et désordonné des eaux qui dévalent les pentes et se ruent bruyamment vers l’abîme est pour nous l’expression d’une folie destructrice qui pourrait nous emporter. Le flux de la cascade est vertical et pressé ; lorsque Héraclite compare le mouvement naturel du monde au flux régulier d’un fleuve : « on ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve », ce flux est lent au point que l’on s’en rend à peine compte, ce qui nous permet de ne pas trop nous inquiéter du temps qui passe. Notre sérénité est encore renforcée par le fait que le flux du fleuve se développe sur un plan horizontal qui est celui de la terre où nous vivons, un monde familier et rassurant. Le flux des eaux de la cascade est lui, vertical et rapide, il provient du ciel et se rue vers les profondeurs de la Terre; véritable Axis Mundi, au sens où l’entend Mircea Elliade, il nous met en relation avec les puissances cosmiques supérieures. Les cieux, même pour les esprits matérialistes que nous sommes devenus, sont encore inconsciemment le lieu qui abritent les forces supérieures qui dirigent ou exercent une influence sur nos vies, que ces puissances soient des divinités ou simplement des astres. Les profondeurs de la Terre vers lesquelles se ruent les eaux de la cascade et parfois même s’y engouffrent et disparaissent sont le domaine des puissances négatives et infernales et le séjour des morts. Nul doute que les eaux de la cascade après un long périple dans le monde souterrain finissent par rejoindre le Styx, le fleuve que Caron fait traverser aux défunts sur sa barque pour les conduire au Royaume des Morts. La cascade inquiète par le monde sacré qu’elle révèle et de là vient sans doute le sentiment de vertige que l’on éprouve lorsque l’on s’en approche. En même temps la cascade, par ses eaux claires, bouillonnantes et écumantes venues du ciel est purificatrice et c’est effectivement l’une des fonctions qu’elle assume dans les cultures chinoise et japonaise. La grotte, elle, premier abri de l’homme, est le refuge, elle symbolise le sein maternel, la matrice où nous avons vécu un temps en toute sécurité dans notre état fœtal et pour lequel nous éprouvons une nostalgie. Y retourner nous est interdit parce ce désir exprime un refus ou une incapacité d’assumer notre condition d’adulte et est le signe d’une régression. Franchir la cascade est une épreuve ou une initiation, c’est le signe d’une transgression ou d’un passage au même titre que l’immersion par le baptême est le signe d’un changement fondamental, d’une métamorphose. A l’intérieur de la grotte nous sommes en sécurité, le monde extérieur est là, à portée de main, mais nous nous ne le percevons que de manière déformée à la manière des ombres projetées des prisonniers de la caverne de Platon qui apparaissaient déformées sur les parois et donnaient une fausse idée de la réalité. Nous sommes dans un « entre-deux », un « autre monde » situé en dehors de l’espace et du temps et nous sommes exclu de la réalité. Mais il faudra bien qu’à un moment, comme l’a fait l’un des prisonniers de la caverne, nous nous décidions de fuir et pour cela traverser de nouveau la cascade, cette fois dans le sens inverse, et rejoindre le monde réel…
la symbolique de la cascade dans la peinture chinoise, coréenne et japonaise La cascade est l’un des thèmes essentiel de la peinture chinoise et ceci très tôt dés le VIIe siècle avec la dynastie des Tang. Dans le couple fondamental qui fonde le paysage formé par la montagne et l’eau, la cascade s’oppose au rocher, comme le yin et le yang. Son mouvement descendant équilibre le mouvement ascendant de la montagne et la dynamique de son flux équilibre l’immobilité et la passivité du rocher. La cascade apparaît comme le mouvement élémentaire, indompté, des « courants de forces » qui animent l’univers et qu’il convient de canaliser et de domestiquer en vue d’un profit spirituel. Certaines légendes originaires de Chine lient les carpes Koi, les cascades et les dragons. C’est en réussissant à franchir les rapides et les cascades dans les lieux appelés « les Portes du Dragon » que les carpes Koi se métamorphosent en dragons d’eau et deviennent ainsi les symboles de lutte, de courage et d’aspiration à atteindre des objectifs élevés.
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Les rites shintoïstes de purification au Japon Le shintô ou « voie des Kami » (voie des dieux) est la religion indigène du Japon. Fortement marqué par son animisme originel, il voue un culte à de multiples divinités naturelles locales et se réfère à trois grandes valeurs essentielles : le culte de la nature avec laquelle il faut rechercher l’harmonie, la pureté rituelle au travers de laquelle on atteint la simplicité dans la vie et l’harmonie avec la nature. et la communion de l’homme avec les divinités, les kamis. Pour le shintoïsme, l’univers est le jeu le jeu d’énergies indestructibles apparaissant en un changement constant dans les phénomènes naturels qui sont des divinités qu’il convient de vénérer pour obtenir leurs faveurs. Parmi ces phénomènes naturels, la cascade constitue l’un des phénomènes naturels sacrés car l’eau purifie l’ascète et le régénère.
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symbolisme de la cascade glacée De nouveaux sports de glace sont apparus il y a une vingtaine d’année : l’ascension de cascades gelées et l’exploration des crevasses des glaciers. Avec la cascade glacée, on pourrait penser qu’Héraclite est mis en défaut puisque le flux vital qui anime la marche du monde et le corps des choses a été stoppé. Il en est rien, d’abord parce que la glaciation et l’état de repos forcé de la matière qui en résulte n’est que momentané même si ce moment peut paraître très long à l’échelle humaine. La fonte des glaces polaires causé par le réchauffement climatique met à jour, fait fondre et recycle des glaces figées depuis de très longues périodes qui libèrent des spores dont certaines ont conservé leur capacité de germination. On ne peut traverser la paroi de glace, on ne peut accéder à la grotte qu’en la contournant, le flux d’eau vivante qui se purifiait et se régénérait par l’afflux d’oxygène n’est plus qu’une masse pétrifiée, figée dans la petite mort de son endormissement. Pour le locataire de la grotte, c’est la vie qui s’est enfuie et son lieu d’accueil a désormais l’apparence d’un sépulcre. Le phénomène de distanciation avec le monde extérieur, la réalité, s’est encore amplifiée. Les contes et les légendes foisonnent de ces situations de ralentissement ou d’endormissement du cycle de la vie. C’est tantôt le soleil qui ne revient pas et qui laisse la place à une nuit éternelle, une princesse qui tombe dans un sommeil profond dont on ne peut la tirer, un royaume où le cycle des saisons s’est interrompu. Toutes ces situations ne font que reprendre le thème du mythe grec de Perséphone, enlevée par Hadès le dieu des Enfers dont la mère Déméter avait interrompu par représailles le rythme des saisons et réduit la terre à la famine. La cascade glacée est un symbole de mort. Les fées ou les reines des glaces sont en général des créatures du mal…
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La maison de la cascade d’Hiroshi Nakamura
Je ne sais si Hiroshi Nakamura, l’architecte qui a conçu L’optical Glass House, avait en tête des pensées et des images de ce genre lorsqu’il a élaboré son projet mais ce qui est sûr c’est que la préoccupation poétique et l’imaginaire spécifique de la culture japonaise n’était pas absents de sa démarche et ont irrigué sa pensée et ses actions :« J’ai conçu la façade de manière à ce qu’elle apparaisse comme une chute d’eau s’écoulant vers le bas, diffusant de la lumière et remplissant l’air de fraîcheur ». Il a également déclaré avoir voulu créer en plein cœur d’une zone urbaine une oasis privée protégée d’où les résidents pouvaient bénéficier de l’animation créée par les mouvements de personnes et de la circulation au-delà des murs :« La vision maintenue sur le paysage urbain avec le défilé silencieux et serein des voitures et des tramways qui passent confère une richesse à la vie dans la maison ».
L’optical Glass House dans son environnement urbain
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Un défi à relever Lorsque l’on visualise le bloc d’immeubles à l’architecture banale et triste, en bordure d’une route à grande circulation génératrice de nuisances diverses et de bruit au sein duquel est venu se nicher le projet élaboré par Hiroshi Nakamura, on se dit, que pour beaucoup, le découragement aurait pu l’emporter et la tentation grande de se fondre dans la banalité ambiante. Il est tout à l’honneur de cet architecte d’avoir relevé le défi et d’avoir eu la volonté de résoudre les problèmes posés par le site en inventant pour cela des techniques sophistiquées imaginatives empreintes de poésie.
Recherche d’intégration au bâti existant L’architecte n’a pas cherché à singulariser sa construction de manière formelle par rapport aux autres construction. le désordre apparent de l’architecture que nous percevons au premier coup d’œil masque en fait un ordre sous-jacent définit par la succession stricte de volumes parrallélépipédiques le long de l’avenue. C’est la différence de taille entre ces volumes, immeubles de 10 étages qui côtoient des maisons individuelles d’à peine deux niveaux qui créé le trouble. Créer dans « la dent creuse » qui devait accueillir le projet une architecture trop originale sur le plan formel ou exubérante ne faisant pas référence au parallélépipède ou au cube aurait ajouté au désordre ambiant par l’irruption dans l’alignement urbain des façades d’un corps étranger. L’architecte a donc sagement choisi d’exprimer sur la rue son architecture par un simple rectangle se rapprochant par ses proportions du carré. Cette structure s’apparente sur le plan formel à deux constructions existantes sur le même côté de la rue : une maison adjacente et la maison située juste après l’immeuble de dix étages construit de l’autre côté. La construction se démarque néanmoins de ses voisines par le traitement violemment coloré de son soubassement qui agit comme un signal lumineux dans un décor où le gris domine et par la transparence de sa façade supérieure qui laisse deviner les silhouettes de quelques arbres, signes de la présence d’un jardin.
le défi architectural L’étroitesse et la petitesse du terrain (environ 244 m2) imposait de construire de limite en limite au moins en ce qui concerne les limites latérales et en hauteur (R+2). Construire en bordure même de la route comme l’avaient fait les immeubles voisins aurait conduit à pénaliser les occupants en les mettant en contact direct avec les nuisances apportées par la route : bruits, agitation, intrusion dans l’espace privé. L’architecte a donc choisi sagement de reculer de quelques mètres la façade de la maison de la limite avec la voie publique. L’espace tampon intermédiaire a été traité en patio planté et permet ainsi la présence d’un morceau de nature dans ce milieu urbain totalement minéral. Ce patio ne pouvait rester totalement ouvert sur la voie publique car il n’aurait réglé dans ce cas que très partiellement les problèmes de nuisances. Il fallait donc le clôturer afin qu’il protège l’intimité des occupants de la maison. Cet organisation de la maison en bordure ou autour d’un jardin clos isolé de la voie publique est d’ailleurs le plan classique des maisons traditionnelles au Japon. Le problème était qu’avec cette solution traditionnelle, la maison et le patio étaient nettement séparés de la rue, privés de son animation et d’une partie de la lumière naturelle. Les désirs des occupants apparaissaient contradictoires : vouloir à la fois s’isoler de la voie publique et de ses nuisances et en même temps s’ouvrir sur celle-ci pour pouvoir bénéficier de l’apport de lumière naturelle et de son animation…
Une idée géniale Le génie de l’architecte réside dans le fait d’avoir imaginé une paroi séparative qui permette de résoudre la contradiction sans que l’un ou l’autre des impératifs soit sacrifié. Cette paroi est constituée de l’assemblage de 6.000 blocs de verre moulé de dimensions 50mm x 235mm x 50mm. Le verre utilisé est un verre borosilicate à teneur élevée en silice très transparent et extrêmement résistant aux chocs thermiques et de faible dilatation linéaire. C’est le verre utilisé par l’industrie nucléaire pour le confinement des déchets nucléaires. La masse de cette paroi de verre permet de lutter efficacement contre les nuisances sonores en provenance de la rue et sa transparence permet à la lumière naturelle en provenance de l’Est d’inonder le patio et les pièces de la maison ouvertes sur celui-ci. De même la vue sur la rue est maintenue. Cette paroi composite agit comme un filtre diffractant la lumière et créant sur les parois du patio et de la maison des miroitements, des reflets et des effets de lumière variés, se modifiant en permanence. L’effet produit est celui que créerait un mur d’eau ou une cascade qui diffracterait la lumière sur les parois environnantes et déformerait les vues. C’est cette paroi que l’architecte qualifie de optical glass façade De là nait un spectacle permanent empreint de poésie qui varie selon la position du soleil, la mise en route de l’éclairage urbain et les allées et venues des véhicules qui empruntent la chaussée. C’était le but recherché par Hiroshi Nakamura qui souhaitait réaliser une maison qui ne serait pas refermée sur elle-même, totalement coupée de la vile et de la nature mais au contraire ouverte sur le monde.
Aspect du mur côté rue, effets d’ombres portées et tâches lumineuses changeantes sur les murs mitoyens du patio et sur les parois des pièces donnant sur celui-ci
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composition de la structure et fabrication des briques de verre La paroi de verre forme un carré de !,6 m de côté et pèse au total 13 tonnes. Elle ne pouvait assurer sa stabilité de manière indépendante et a du être maintenue par l’incorporation d’une trame métallique et supportée par une poutre en partie supérieure. Chaque brique de verre a donc été percée de 2 trous qui permettent le passage de 75 tiges d’acier inoxydable suspendues au cadre en béton armé et en acier et a nécessité pour sa stabilité l’incorporation de 75 tiges d’acier inoxydable suspendues à un cadre en béton armé et en acier. La poutre de support, si elle avait été construite uniquement en béton aurait été massive et aurait nuit à l’effet de légèreté recherché. Ses dimensions ont été réduites au minimum par l’utilisation d’une structure composite en acier et béton précontraint. Les contraintes latérales ont été également réduites par l’incorporation de barres en acier plat de dimensions 40 x 4 mm. Ces barres sont logées à l’intérieur des blocs de verre pour les rendre invisibles et ainsi un joint d’étanchéité de 6 mm. Le résultat est une façade transparente, vue du jardin ou de la rue produisant des effets optiques inattendus dans l’espace intérieur.
Processus de fabrication et de montage des briques de verre
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organisation de la maison : coupe et plans
coupe longitudinale
plan du Rez-de-chaussée : garage, hall d’entrée, chambre d’appoint, salle de jeu
Volume de l’entrée au rez-de-chaussée, le bassin du patio du niveau 1 a son fond vitré qui permet un éclairage zénithal de ce volume et la projection des ombres portées des arbres sur les parois.
niveau 1 : patio, séjour, salle à manger, cuisine, buanderie – photos ci-dessous : patio, séjour et salle à manger
le séjour/salon est totalement ouvert sur le patio/oasis et n’est protégé contre les éléments extérieurs que par un léger rideau de métal à parement réalisé par pulvérisation cathodique.
niveau 2 : 3 chambres et salles de bains
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la magie opère aussi à l’extérieur
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Optical Glass House by Hiroshi Nakamura & NAP – video YouTube
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L’avis d’Enki
Les maisons contemporaines sont à l’image de la vie que la majorité de nos concitoyens qui vivent dans les villes mène désormais : une vie le plus souvent coupée de la nature et d’où les signes de l’existence et de la présence du Cosmos se réduisent de plus en plus. Dans nos villes, l’excès d’éclairage artificiel a fait disparaître les étoiles. Les berges des cours d’eau ont été canalisées et les plus petits d’entre eux ont été enterrés et recouverts de béton. Nous passons une grande partie de notre temps dans notre voiture, dans les transports en commun et dans des espaces clos et confinés pour nous protéger de tout ce que nous jugeons négatif ou excessif dans les effets du climat. Dans certains immeubles, les baies ne peuvent plus s’ouvrir, économie d’énergie et conditionnement de l’air oblige. Le vent, le courant d’air sont proscrits, l’air même que nous respirons peut être un ennemi. Les habitants des grandes villes ne connaissent que rarement le bonheur de flâner le long d’un ruisseau et de jouir du spectacle des auréoles formées par la chute des gouttes de pluie sur un plan d’eau. La Nature a été évacuée de notre environnement direct et n’est la plupart du temps présente que sous une forme abâtardie. La plupart de nos maisons sont des espaces aseptisés, des « machines à habiter » comme les désignait Le Corbusier tout juste bons à satisfaire nos besoins physiques fondamentaux. En même temps, les liens entre le lieu d’habitation et la Cité s’est distendu et le lien social se délie. la ville, pour ses habitants n’apparaît plus comme le lieu des échanges sociaux mais comme un lieu de nuisances dont il faut se protéger. L’architecte japonais Hiroshi Nakamura a choisi de lutter contre cette réduction et cet appauvrissement. Dans une situation difficile presque désespérée résultant de la médiocrité de l’environnement ambiant – une route à grande circulation source de nuisances multiples bordée d’immeubles de dix étages à l’architecture le plus souvent médiocre –, il a réalisé une construction qui, au-delà de la performance technique et architecturale, se veut un acte de foi et de confiance dans la vie, une vie qui ne serait plus étriquée et amputée de ses relations avec la nature et la cité, mais une vie pleine, ouverte, embrassant le monde dans sa totalité. La nature, tout d’abord, Hiroshi Nakamura a réussi à la rendre omniprésente grâce à des symboles et des signes puissants visibles de toutes les pièces. L’espace tampon séparant la maison de la rue est plus qu’un patio, l’architecte magicien a réussi à en faire une oasis, une oasis de verdure, de calme et de fraîcheur où l’eau et la lumière ruissellent, un havre de paix tout en maintenant un lien visuel avec le monde minéral plein d’agitation et livré à une fureur bruyante qui l’encercle.
David contre Goliath
Le premier des défis à relever concernait le problème posé par l’intégration d’une construction de petite dimension dans l’alignement des grands immeubles de bureaux ou d’habitation bordant cette voie routière à grande circulation. L’architecte a choisi une solution qui lui permet tout à la fois de s’intégrer dans le bâti existant en réutilisant le vocabulaire architectural mis en œuvre sur le site et de s’en démarquer par le choix des matériaux et des couleurs et dans ce choc des deux architectures, c’est le petit David qui, grâce à ses facultés inventives en matière de technologie et d’esthétisme, sort vainqueur de la confrontation qui l’opposait aux Goliaths.
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La paroi magique C’est bien de magie qu’il est question : imaginez une paroi de verre qui bloque le son, filtre et réfracte la lumière, métamorphose les images en provenance de la rue en un jeu mouvant de formes et de couleurs imprécises, une paroi translucide dont on ne sait plus si elle est de verre ou si elle est constituée d’un mur d’eau figé, d’une cascade qui aurait été soudainement gelée ou pétrifiée. Cette paroi magique apparaît comme un immense kaléidoscope qui projette en permanence sur toutes les parois du patio et de la maison, murs, sols, plafonds, des reflets d’ombre et de lumière, des tâches colorées mouvantes et changeantes dans un spectacle continu. Cette paroi ne constitue pas une barrière infranchissable contre la ville, elle agit comme un filtre magique qui ne laisse passer les images qu’après les avoir lissées, rendues inoffensives et bienveillantes. L’effet de « chute d’eau » produit par la paroi de verre est suggestif au point que Hiroshi Nakamura lui-même va jusqu’à déclarer que cette paroi a un effet de « rafraichissement » du patio.
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Les jardins Le jardin-patio constitue avec la paroi de verre contre laquelle il est adossé, un espace naturel tampon entre la maison et la ville. Avec la paroi de verre qui s’apparente à une cascade, la présence d’arbres et un plan d’eau sur la surface duquel se reflète les jeux de lumière provenant de la paroi de verre, il symbolise la nature dans tous ses états. Ce jardin est visible depuis toutes les chambres, et le caractère translucide de la paroi de verre permet aux occupants de la maison de visualiser le défilé silencieux et serein des voitures et des tramways qui passent sur la voie urbaine. Un deuxième jardin se développant sur deux niveaux est situé à l’arrière de la maison.
Le jardin-patio « oasis » : un jardin symbolique, à travers les quelques érables et végétaux plantés ce sont les forêts montagneuses profondes du Japon que les habitants ont en tête, la paroi de verre translucide représentent pour eux les cascades sacrées protectrices et purificatrices, le bassin représente les lacs et les eaux dormantes. On est surpris de le pas voir la présence d’un rocher à la forme remarquable comme on les trouve habituellement dans les jardins Zen…
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Le bassin des sortilèges La paroi verticale et ses effets se projette et se double sur le plancher horizontal du patio en se mirant dans l’eau d’un bassin. Ce bassin est l’objet d’un sortilège : il est sans fond et à travers lui on distingue, à partir du jardin-patio, le vestibule de l’entrée de la maison au rez-de-chaussée. A l’inverse, lorsque l’on se trouve dans le vestibule du rez-de-chaussée, on distingue par transparence la végétation du patio et la cascade figée. Celle ci projette sur la surface de l’eau du bassin et jusqu’au sol du vestibule ses miroitements et ses reflets. Lorsque le temps est à la pluie, les gouttes d’eau qui heurtent la surface du plan d’eau créent de multiples effets d’auréoles visibles par le haut à partir du séjour du niveau 1 et du patio mais aussi depuis le bas, en plafond, à partir du vestibule du rez-de-chaussée. Ces auréoles sont visibles une nouvelle fois sur le sol du vestibule par projection. La mise en scène de l’entrée dans la maison dans le passage dans le vestibule sous le plan d’eau du jardin-patio dont les miroitements lumineux se reflètent sur les parois s’apparente à la traversée mythique de la cascade qui ouvre la voie à la caverne. La pénétration dans la maison est ainsi investie d’une haute valeur symbolique.
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la danse des voiles Comment perçoit-on le mieux l’effet poétique du vent dans une maison ? Par son action sur les rideaux. Dans la maison de la cascade, la pièce de séjour s’ouvre totalement sur le patio-jardin dont elle n’est séparée que par un rideau transparent de métal léger réalisé par pulvérisation cathodique que le moindre souffle d’air fait flotter. Lorsqu’il se replie, le rideau révèle une seconde paroi de blocs de verre à l’arrière de la salle, qui borde l’escalier central qui relie les différents niveaux. Lorsque l’on voit le léger voile danser sous l’action du vent on pense irrésistiblement au tableau intitulé « Vent de la mer » que le peintre André Wyeth a peint en 1947.
le vent marin d’André Wyeth et le rideau métallique transparent de l’Optical Glass House
Architecture très simple et contemporaine pour cette maison de 195 m2 réalisée en 2006 par l’architecte Claude Veyret, architecte DPLG à Villeurbanne près de Lyon, dans un grand lotissement de la banlieue lyonnaise. Le volume de base est un parallélépipède étroit dans lequel se superposent : au rez-de-chaussée, l’entrée, le séjour, le salon et la cuisine et à l’étage les chambres, salles de bains et espace mezzanine ouvert sur le séjour par l’intermédiaire d’une trémie dans laquelle a été placé l’escalier métallique d’accès. Devant la trémie, une grande baie vitrée se développe sur une hauteur de deux niveaux et permet ainsi d’éclairer généreusement de manière naturelle les espaces séjour et mezzanine ainsi que l’escalier d’accès en même temps qu’elle permet la vue sur le jardin.
Le volume offert par ce parallélépipède aurait pu suffire pour répondre au programme de surface fixé mais l’architecture de l’ensemble aurait alors souffert d’un excès de rigueur et de simplicité qui n’aurait pas permis d’exprimer au niveau des façades l’organisation intérieure de la maison. L’architecte a donc astucieusement encastré dans le volume de base deux autres volumes de taille réduite qui impriment à l’ensemble un dynamisme et une tension. L’un des volumes, parallélépipèdique lui aussi, sur la façade côté jardin, abrite l’espace cuisine et l’autre possédant une face courbe, côté route d’accès, qui renferme des espaces de rangement. Le contraste entre le volume des base et ces volumes secondaires est encore accentué par un traitement chromatique différent, clair pour le volume de base et gris foncé pour les volumes secondaires. Enfin, pour protéger la grande baie vitrée et la porte d’entrée des intempéries, l’architecte a rapporté sur les façades des auvents en dalle béton qui se retournent jusqu’au sol sur l’un des côtés. Outre la mise en valeur de la grande baie vitrée sur la façade côté jardin par effet d’encadrement, cette disposition permet de mieux singulariser l’espace terrasse par rapport au jardin. Ces auvents-encadrements sont traités de la même couleur gris sombres que les volumes secondaires et semblent « faire écho » à ceux-ci dans la lecture des façades. A noter les quelques ouvertures de l’étage type hublots qui préservent grâce à leur forme circulaire l’effet de surface des parties pleines des façades.
Le résultat génère une harmonie d’ensemble qui s’exprime bien sur les façades côté jardin et latérale de l’entrée de la maison. Une telle simplicité formelle basée sur l’utilisation de volumes de base de type parallélépipèdique impliquait une toiture plate. Une toiture en pente aurait nuit à la simplicité et l’harmonie d’ensemble et apporté une complexité et un alourdissement inutile. Il semble que le reste du lotissement soit occupé par des maisons traditionnelles avec toits à double pente. Quel peut être l’effet produit par une maison à l’architecture franchement contemporaine érigée au milieu d’un ensemble de constructions traditionnelles avec toitures à deux pans ? Tout dépend, me semble t’il, de la qualité architecturale de ces maisons traditionnelles. Si ces maisons s’intègrent à un ensemble bâti pour lequel un effort de coordination et d’intégration a été mis en œuvre, la présence, à proximité immédiate, d’une construction à l’architecture totalement différente paraîtra certainement incongrue et provocatrice. Si par contre, les architectures des autres maisons ne sont aucunement intégrées et apparaissent disparates, dans ce cas la réalisation d’une maison franchement contemporaine se trouve pleinement justifiée et peut constituer un exemple et un même un manifeste pour aider à l’évolution de l’architecture de la maison individuelle.
coût : 1.600 € le m2. développement durable et économie d’énergie : aucune information obtenue.
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façade côté jardin : noter la grande baie vitrée sur deux niveaux qui occupe près de la moitié de la surface de la façade encadrée par l’auvent béton et son retour vertical, le « jeu de volumes » que créé par le volume secondaire abritant la cuisine qui semble jaillir du volume principal de la construction et dont la teinte gris foncé tranche avec la teinte claire de la façade principale, les ouvertures secondaires de forme différenciée : rectangle pour la cuisine et cercle pour une pièce de l’étage, la terrasse en partie protégée par l’auvent et son retour vertical, prolongement de l’espace extérieur sur le jardin.
Angle des façades côté jardin et de l’entrée de la maison : à noter les éléments architecturaux complémentaires aux volume parallélépipèdique principal : volume cuisine, auvent de protection de la grande baie vitrée sur deux niveaux et auvent de l’entrée avec leurs retours verticaux qui sont colorés de la même manière, ainsi que la reprise des ouvertures circulaires qui se « »font écho de façade en façade assurant ainsi l’unité architecturale d’ensemble. A noter également la présence d’une deuxième terrasse d’angle qui visuellement « rattache » et assied la construction sur le sol et le jardin.
La baie vitrée double hauteur met en relation la salle à manger avec l’espace repas extérieur.
Vue depuis le salon sur l’ensemble du séjour et sur l’escalier.
La cuisine communique avec une terrasse Sud par la grande porte-fenêtre et possède une fenêtre bandeau sur le jardin.
Escalier d’accès à la mezzanine de l’étage vu du séjour.
La mezzanine traversante permet au soleil couchant de pénétrer dans la maison. Vue sur le jardin depuis la mezzanine desservant les chambres.
A l’étage, la chambre des parents possède une terrasse réalisée sur le toit du volume de la cuisine.
façade Est côté rue : à noter l’aspect minimaliste et même austère du traitement de cette façade qui exprime ainsi le désir de protection de l’intimité de la maison et de ses occupants par rapport à l’espace public. Peu d’ouvertures, traitées de manière simple et fonctionnelles (fenêtres des chambres et de l’espace mezzanine). Seuls, la fenêtre hublot de rez-de-chaussée et le volume arrondi de l’espace rangement en saillie du volume principal apportent un peu de fantaisie à cette façade et rappellent certains éléments constitutifs des autres façades assurant ainsi l’unité architecturale d’ensemble.
La façade d’arrivée sur la maison préserve l’intimité de la partie nuit de la maison par ses ouvertures réduites . La fermeture de la maison sur la rue est accentuée par un portail plein, prolongeant l’enceinte.
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–––– Autres projets réalisés par le cabinet Claude Veyret ––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Pour le site internet de Claude Veyret, c’est ICI.
« Là où naît l’ordre, naît le bien-être. » Le Corbusier (1887-1965)
La villa Savoye est une maison emblématique construite en France de 1929 à 1931 par l’architecte d’origine Suisse Le Corbusier (de son vrai nom Charles-Edouard Jeanneret-Gris), sur la commune de Poissy, dans le département des Yvelines. Elle a contribué à jeter les bases d’une nouvelle architecture domestique et a exercé une influence considérable dans l’histoire de l’architecture. Cette villa apparait comme l’aboutissement des recherches formelles de Le Corbusier et la mise en œuvre systématique de sa théorie des cinq points de l’architecture nouvelle réalisées lors de l’étude et la réalisation des villas qui l’ont précédées qui sont rassemblées sous le vocable des « Villas blanches ».
Pour en savoir plus sur la villa Savoye, c’est « ICI« .
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–––– Les villas de Le Corbusier qui ont précédé la villa Savoye, dites « villas blanches » ––––––––––––
villa Jeanneret-Perret (plan de 1912), dite « Maison Blanche » réalisée pour ses parents à La Chaux-de-Fond (Suisse).
la Villa Ker-Ka-Ré aussi appelée Villa Besnus, à Vaucresson, sa première réalisation française livrée en 1923 à un couple de rentiers retraités.
la maison-atelier Ozenfant pour son ami peintre, à Paris, également livré en 1923
les six maisons ouvrières réalisées à Lège à l’invitation de l’industriel bordelais Henri Frugès.
la Villa Le Lac à Corseaux au bord du lac Léman, commandée par ses parents, construite en 1924.
la Cité Frugès à Pessac est composé de 50 logements dans le quartier moderne de Pessac, commandés en 1924 par le promoteur Henri Frugès et construits en 1926. « Je vous autorise à réaliser dans la pratique vos théories (…) Pessac doit être un laboratoire. » Henry Frugès passe commmande à l’architecte Le Corbusier en 1924. En effet le riche industriel pessacais souhaite implanter une » cité-jardin » pour loger ses ouvriers. L’absence de viabilisation du quartier entraîne la faillite du promoteur.
la villa La Roche (1923-1925), pour le collectionneur et banquier Raoul La Roche. Le bâtiment comprend un appartement destiné à la famille de son frère pianiste, Alfred Jeanneret. Elle est l’actuelle Fondation Le Corbusier, à Paris.
C’est à propos de cette Villa que le Corbusier présente la notion de promenade architecturale :
« On entre : le spectacle architectural s’offre de suite au regard; on suit un itinéraire et les perspectives se développent avec une grande variété; on joue avec l’afflux de la lumière éclairant les murs ou créant des pénombres. Les baies ouvrent des perspectives sur l’extérieur où l’on retrouve l’unité architecturale.»
La Villa Cook à Boulogne sur Seine en 1927.
La Villa Stein, « villa les terrasses », livrée vers 1929 à Garches.
Pour cette villa, Le Corbusier va exploiter de nouveau la notion de « promenade architecturale déjà expérimentée dans la villa Roche, en particulier dans le parcours extérieur de la pièce de la pièce à l’air libre jouxtant la maison :
«De l’intérieur du vestibule, une rampe douce conduit, sans qu’on s’en aperçoive presque, au premier étage, où se déploie la vie de l’habitant : réception, chambres, etc. Prenant vue et lumière sur le pourtour régulier de la boîte, les différentes pièces viennent se coudoyer en rayonnant sur le jardin suspendu qui est là comme un distributeur de lumière appropriée et de soleil (…) mais on continue la promenade. Depuis le jardin à l’étage, on monte par la rampe sur le toit de la maison où est le solarium. L’architecture arabe nous donne un ensei- gnement précieux. Elle s’apprécie à la marche, avec le pied; c’est en marchant, en se déplaçant que l’on voit se développer les ordonnances de l’architecture. C’est un principe contraire à l’architecture baroque qui est conçue sur le papier, autour d’un point fixe théorique. Je préfère l’enseignement de l’architecture arabe. Dans cette maison-ci, il s’agit d’une véritable promenade architecturale, offrant des aspects constamment variés, inattendus, parfois étonnants. Il est intéressant d’obtenir tant de diversité quand on a, par exemple, admis au point de vue constructif, un schéma de poteaux et de poutres d’une rigueur absolue.»
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–––– Sites et documentation utiles ––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––––
Comment les enfants occidentaux dessinent-ils une maison ? Le plus souvent avec un toit d’où dépasse une cheminée qui fume, même si ces enfants habitent un immeuble collectif dans une cité de banlieue… Ce constat amène à penser qu’il existe en Occident une image archétypale de la maison individuelle alimentée par la culture dominante et perpétuée par les médias.
Pourtant les maisons ne possèdent pas toutes un toit. dans les régions semi-désertiques du Moyen-Orient et d’Amérique où le bois était rare, les constructions étaient généralement de formes parallélépipédiques avec un toit plat. Maisons d’architecture « Zabour » au Yemen – photo Piardoch
Mario Botta a osé, osé sortir du moule pré-formaté des habitudes, des préjugés, des règlements publics d’architecture qui, par facilité ou frilosité, freinent l’imagination et la recherche architecturale. Peut-être cette indépendance d’esprit provient-elle de sa formation première en dehors du circuit universitaire officiel. En 1958, à l’âge de quinze ans, il quitte l’école pour devenir apprenti dessinateur en bâtiment chez deux architectes de son Tessin natal : Luigi Camenish et Tita Carloni qui exercent à Lugano. Il y fait preuve d’un certain talent puisque un an plus tard, il concevra sa première maison d’habitation et découvre sa vocation : l’architecture. Il reprend alors ses études interrompues en s’inscrivant en 1961 au « Liceo Artistico » de Milan, puis à « l’Istituto Universitario di Archittettura » de Venise. Durant ses études, il continuera à travailler dans des agences d’architecture, notamment celle de Le Corbusier en 1965. Il ouvrira sa propre agence à Lugano, en 1970, à l’âge de 27 ans.